[Test] Retro Geek Shop Simulator
Il y a quelque chose d’attendrissant dans l’idée de tenir une boutique de jeux vidéo rétro, d’ouvrir chaque matin les volets d’un petit magasin rempli de cartouches poussiéreuses, de figurines éraflées et de consoles à tubes cathodiques. Retro Geek Shop Simulator part justement de ce fantasme doux-amer : celui de devenir, le temps de quelques heures, le gardien d’un temple du pixel. Pourtant, derrière ce décor séduisant, l’expérience se délite vite, à mesure que la nostalgie laisse place à la routine.
Le jeu s’inscrit dans la mouvance de ces « simulateurs de vie quotidienne » qui fleurissent depuis quelques années sur toutes les plateformes. Après Gas Station Simulator, Coffee Talk ou House Flipper, voici donc l’épisode dédié à la culture geek et au commerce de la passion. L’idée de départ est charmante : on y incarne un vendeur de boutique rétro, chargé de gérer son stock, d’encaisser les clients, de décorer son espace et de chasser les pièces rares pour compléter sa collection personnelle. Sur le papier, c’est un rêve éveillé pour les nostalgiques de la 16 bits et les collectionneurs compulsifs. Dans les faits, Retro Geek Shop Simulator se contente de dérouler un canevas convenu, sans jamais réussir à lui donner de véritable souffle.
Dès les premières minutes, le ton est donné : le joueur prend possession d’un minuscule magasin aux airs de caverne d’Ali Baba, où chaque étagère évoque un pan de l’histoire vidéoludique. Les développeurs ont manifestement voulu jouer sur le mélange des époques, et l’on retrouve un peu de tout : des bornes d’arcade miniaturisées côtoient des boîtes de jeux inspirées de la Mega Drive ou de la NES, tandis qu’une Game Boy sert de terminal de paiement — clin d’œil amusant, quoique un peu forcé. L’univers graphique est bariolé, presque caricatural, avec ce charme maladroit des productions indépendantes étrangères : un patchwork d’objets familiers mais sans réelle identité visuelle. C’est mignon, certes, mais on a souvent l’impression de visiter une boutique de souvenirs plutôt qu’un lieu vivant.
Sur le plan narratif, le jeu ne s’embarrasse pas d’un scénario. Aucun fil rouge, pas de personnage secondaire mémorable, aucune rivalité commerciale ou intrigue de quartier. Le joueur enchaîne les journées de travail à la caisse, répond à des clients toujours semblables, vend ou rachète des jeux, puis ferme boutique. La progression repose sur la lente accumulation d’argent permettant d’acheter de nouveaux produits ou d’améliorer la décoration. Mais l’absence d’événements marquants finit par peser : au bout de deux heures, on a déjà vu l’essentiel, et la mécanique s’enraye.
Le gameplay, justement, est à la fois le cœur et le talon d’Achille du jeu. L’essentiel du temps se passe derrière la caisse, à scanner des produits, rendre la monnaie et entretenir la boutique. C’est un choix assumé — une sorte de méditation mécanique — mais le manque de variété rend l’expérience monotone. Les quelques activités annexes, comme la chasse aux pièces de collection ou la personnalisation du magasin, ne suffisent pas à briser la routine. Le jeu semble prisonnier de sa propre idée : il veut nous faire ressentir la lenteur et la banalité du quotidien d’un commerçant, mais sans offrir la profondeur de gestion ou les imprévus qui pourraient donner du relief à cette monotonie. Là où Coffee Talk transforme la répétition en rituel, Retro Geek Shop Simulator se contente d’un enchaînement de tâches sans âme.
Techniquement, la version PS5 est stable, sans véritable bug ni ralentissement, mais rien ne tire parti de la machine. Les textures sont simples, les modèles 3D rigides, les animations minimalistes. Le jeu aurait tout aussi bien pu tourner sur une console d’il y a dix ans. Ce n’est pas forcément un problème en soi — le charme rétro peut se contenter de peu —, mais ici, l’esthétique semble plus contrainte qu’intentionnelle. Le choix de couleurs criardes, les éclairages figés et les menus datés rappellent davantage une production mobile qu’un jeu console à part entière. On ne peut s’empêcher de penser à Anime Shop Simulator ou Figures Shop Simulator, qui, sans être des chefs-d’œuvre, affichaient une meilleure maîtrise visuelle et un sens plus affirmé du détail.
En revanche, le travail sur l’audio mérite d’être salué. Les développeurs ont manifestement compris qu’un jeu consacré à la nostalgie vidéoludique ne pouvait se passer d’une ambiance sonore soignée. Chaque bruit de touche, chaque bip de terminal, chaque porte de console qui claque évoque un souvenir d’enfance. Les musiques, volontairement synthétiques, rappellent les compositions 8-bit des années 80 sans jamais tomber dans la parodie. Certains thèmes, notamment ceux qui accompagnent la fermeture de la boutique, dégagent une mélancolie inattendue. On sent une vraie affection dans cette bande-son, une volonté d’ancrer le joueur dans un cocon sonore familier, même lorsque le reste du jeu s’essouffle.
La durée de vie, elle, est courte : il faut environ cinq heures pour « platiner » le jeu, c’est-à-dire obtenir tous les trophées et débloquer les rares bonus disponibles. Une durée honnête pour un titre vendu à petit prix, mais qui laisse un goût d’inachevé. On aurait aimé que le jeu ose davantage : introduire une gestion de clientèle plus fine, des collections à thème, des mini-événements inspirés de l’histoire du jeu vidéo… Rien de tout cela n’existe ici. L’expérience se termine avant même d’avoir véritablement commencé, et la rejouabilité est quasi nulle. Une fois la boutique remplie, il n’y a plus de raison d’y retourner.
Ce manque de profondeur serait plus pardonnable si le jeu parvenait à générer une émotion, un attachement, quelque chose qui nous pousse à rouvrir la boutique chaque matin. Mais Retro Geek Shop Simulator reste en surface. Il ne parvient jamais à transformer la nostalgie en expérience sensible, ni la répétition en contemplation. Les références rétro, qui auraient pu servir de fil conducteur, se réduisent à un simple habillage. On vend des boîtes, on encaisse, on décore, et l’on passe à autre chose. Rien ne s’imprime, rien ne reste.
Le rapport qualité-prix dépendra donc de ce que l’on en attend. Si l’on cherche un petit jeu d’ambiance, facile à prendre en main et sans contrainte, il peut procurer quelques heures de détente. Mais si l’on espérait un hommage vibrant à la culture geek, une simulation riche et inventive du monde des boutiques spécialisées, on risque d’être déçu. D’autant que le marché regorge de productions similaires, souvent plus ambitieuses. Ici, l’ensemble manque de direction, comme si le jeu s’était arrêté au stade de la démo.
Et pourtant, malgré ces défauts, il subsiste une certaine tendresse pour ce projet. On sent que ses concepteurs aiment sincèrement le jeu vidéo et ses objets. Leurs maladresses sont celles de passionnés plus que de cyniques. Si Retro Geek Shop Simulator échoue à captiver, c’est moins par manque de travail que par excès de simplicité. À vouloir tout rendre accessible, il s’est privé de profondeur. À vouloir flatter la nostalgie, il a oublié d’inventer sa propre identité.
En refermant la boutique virtuelle après ces cinq heures d’essai, je me suis surprise à éprouver une forme de mélancolie. Non pas celle du jeu lui-même, mais celle d’un potentiel gâché. Il y avait là, dans cette idée de commerce rétro, matière à une expérience poétique, presque muséale — une réflexion sur la mémoire du joueur, sur l’objet vidéoludique, sur la valeur du temps passé devant un écran. Retro Geek Shop Simulator n’en retient que la surface, mais laisse entrevoir ce que pourrait être, un jour, un véritable « simulateur de nostalgie ».
En somme, Retro Geek Shop Simulator sur PS5 est une curiosité plus qu’une recommandation. Son concept est charmant, son ambiance sonore réussie, mais son gameplay s’épuise vite et son esthétique peine à convaincre. Une petite expérience pour collectionneurs indulgents, plus qu’un jeu à recommander à tous. Espérons que du contenu sera ajouté avec le temps, façon TCG Card Shop Simulator qui lui, pour le coup est l’exemple à suivre !
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