[Test] Is This Game Trying to Kill Me?

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[Test] Is This Game Trying to Kill Me?

Il arrive parfois qu’un jeu vidéo prenne à contrepied les habitudes du joueur, non pas en tentant de le surprendre avec un retournement de situation narratif banal, mais en questionnant directement sa présence même devant l’écran. Is This Game Trying to Kill Me? est de cette trempe rare, où la mécanique de jeu devient un prétexte à une expérience cognitive troublante, à la frontière entre jeu vidéo, théâtre interactif et réflexion sur la conscience de jeu. Dès les premières minutes, l’œuvre captive par sa proposition atypique. On se réveille dans une cabane en bois lugubre, plongé dans une obscurité pesante, un squelette comme seul compagnon. Un vieil ordinateur trône au centre de la pièce. Aucun tutoriel, aucun objectif clairement indiqué. Seulement cette machine, allumée, qui semble réclamer notre attention. Et ainsi débute un voyage où la frontière entre fiction et réalité se dissout peu à peu.

[Test] Is This Game Trying to Kill Me?

Le cœur du jeu repose sur une mécanique de double interaction. D’un côté, il faut évoluer dans la cabane, observer, fouiller, comprendre son agencement, découvrir ses secrets. De l’autre, un jeu rétro à l’intérieur du jeu s’ouvre sur l’ordinateur, aux graphismes pixelisés, qui propose ses propres défis. Ce qui rend cette dualité fascinante, c’est la manière dont ces deux dimensions interagissent. Une action dans le jeu rétro peut provoquer des effets concrets dans la cabane, tandis que des objets découverts dans l’espace physique influencent les possibilités du jeu à l’écran. Ce va-et-vient constant tisse une toile narrative dense où le joueur doit faire preuve d’attention et de logique pour progresser. Les énigmes, nombreuses, sont souvent retorses mais rarement injustes. Elles exigent une observation minutieuse et une volonté de lier les éléments entre eux sans toujours en percevoir la logique immédiate. Ce qui pourrait être frustrant dans un autre contexte devient ici stimulant, précisément parce que chaque interaction semble lourde de conséquences.

Ce qui frappe aussi, c’est la manière dont le jeu construit son ambiance. Le décor est volontairement restreint, presque claustrophobique. La cabane, unique lieu d’exploration « réelle », est truffée de détails visuels et sonores qui renforcent le sentiment d’enfermement. Des grincements de bois, le bruit distant d’une porte qui s’ouvre alors que l’on est seul, un souffle imperceptible derrière soi… tout participe à créer un malaise diffus. La direction artistique est minimaliste, presque austère, mais cela fonctionne à merveille. Le contraste entre la 3D simple et brute de la cabane et le style pixelisé du jeu intégré renforce encore l’idée d’un monde fracturé, en miroir déformé. L’ensemble évoque parfois les sensations d’un rêve éveillé, où la logique ordinaire ne s’applique plus vraiment, mais où l’instinct devient le seul guide fiable.

[Test] Is This Game Trying to Kill Me?

Narrativement, Is This Game Trying to Kill Me? choisit de rester énigmatique. Il n’y a pas de longues cinématiques, pas de dialogues explicatifs. Tout est suggéré par des indices visuels, des textes lacunaires, des objets placés à des endroits incongrus. Cette approche narrative fragmentaire pousse le joueur à devenir acteur de l’histoire, à assembler les pièces d’un puzzle dont il n’a pas l’image finale. Plusieurs interprétations sont possibles, et il ne fait aucun doute que certaines resteront volontairement ouvertes. Loin de frustrer, cette absence de réponses définitives renforce le propos du jeu : le danger ne vient pas seulement de ce qui est montré, mais surtout de ce qui est insinué, laissé en suspens, suggéré dans le non-dit.

La tension qui se dégage de l’ensemble ne repose pas uniquement sur l’ambiance sonore ou sur les effets visuels. Elle naît surtout de l’idée que le jeu lui-même devient un piège. Le titre l’annonce dès le départ, presque comme une provocation : le jeu essaie-t-il vraiment de tuer le joueur ? Et si oui, au sens littéral ou métaphorique ? Très vite, cette question s’impose comme une obsession. On commence à douter de chaque mécanisme, de chaque routine de gameplay. Est-ce que cette énigme est vraiment solvable ou est-ce un leurre ? Est-ce que quitter le jeu est une victoire ou une défaite ? Est-ce que la mort dans le jeu a une incidence sur notre personnage dans la cabane ? Ce questionnement constant est l’un des plus grands succès de l’expérience. Il transforme le joueur passif en un participant actif à une expérience presque philosophique.

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La jouabilité, bien que simple, se révèle étonnamment précise. Les interactions sont limitées à quelques actions – observer, manipuler, utiliser – mais leur exécution est fluide, intuitive, sans friction technique. Le titre fait le choix intelligent de ne jamais surcharger son interface ni d’imposer des mécaniques superflues. Chaque élément présent à l’écran a un sens, un rôle, une justification. Cette sobriété ergonomique permet de se concentrer sur l’essentiel : le lien entre le joueur et le jeu, et les conséquences de ce lien. À aucun moment, on ne sent que le gameplay sert à remplir artificiellement la durée de vie. Chaque étape semble pensée, conçue pour perturber, provoquer, parfois déranger.

L’expérience est relativement courte – entre deux et quatre heures selon la vitesse d’exécution – mais jamais creuse. La densité de ce qui est proposé compense largement la brièveté. Il s’agit d’un jeu qui privilégie l’intensité à la quantité. Plusieurs fins sont disponibles, chacune apportant une nuance nouvelle à l’interprétation générale. Le joueur est alors invité à rejouer, non pas pour le défi, mais pour l’exploration narrative. C’est une œuvre qui se vit plus qu’elle ne se consomme, qui invite à la réflexion une fois l’écran éteint. On continue d’y penser, de s’interroger, de remettre en question ce que l’on a vu… ou cru voir.

[Test] Is This Game Trying to Kill Me?

En fin de compte, Is This Game Trying to Kill Me? n’est pas seulement un jeu vidéo. C’est un dispositif expérimental, une proposition artistique qui utilise les codes du médium pour les détourner, les tordre, les transcender. Loin des productions tapageuses, il s’impose par son intelligence, sa sobriété et sa capacité à créer du sens là où l’on attendait simplement du divertissement. Il n’a pas besoin de grandes envolées lyriques ni d’effets spéciaux spectaculaires pour marquer durablement celui qui s’y aventure. Il suffit d’une cabane, d’un ordinateur et d’un jeu à l’intérieur du jeu pour que la magie opère.

Le titre de l’œuvre n’est pas qu’un gimmick. C’est une question posée au joueur, une interpellation directe. Est-ce que ce jeu essaie vraiment de nous tuer ? Ou bien essaie-t-il simplement de nous réveiller, de nous sortir de notre confort vidéoludique, de nous rappeler que jouer, c’est aussi prendre des risques, affronter l’inconnu, et parfois se perdre un peu pour mieux se retrouver ? À chacun sa réponse. Mais une chose est sûre : ce jeu ne laisse pas indifférent. Et c’est peut-être là sa plus grande réussite.

 



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